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Monday, September 21, 2015

Poutine s’active en Syrie. En pensant à l’Ukraine?

Moscou renforce sa présence militaire chez son allié Assad. Peut-être pour peser sur les négociations sur le Dombass.



Et si, pour l’aider à sortir de son isolement international depuis la crise ukrainienne, le Kremlin de Vladimir Poutine feignait de lancer une offensive contre les islamistes en Syrie? Les dernières manœuvres russes laissent diplomates et analystes dans l’expectative. Alors que parallèlement, le front ukrainien s’est apaisé.


«Une coïncidence?» s’interroge un haut diplomate européen à Moscou, impliqué dans les coulisses du sommet prévu pour le 2 octobre à Paris entre Vladimir Poutine et le président ukrainien Petro Porochenko. «Ces dernières semaines, il y a une claire volonté du Kremlin de faire avancer les négociations sur l’Ukraine, témoigne-t-il. Poutine prépare peut-être son opinion publique à accepter des concessions…»

Dans le même temps en effet, la Russie fait preuve d’un activisme inédit en Syrie. Jusqu’ici, Moscou s’est défendu en arguant qu’elle poursuivait seulement ses habituelles livraisons d’aides humanitaires et d’armement au régime de Bachar el-Assad. Hier pourtant, le ministre syrien des Affaires étrangères, Walid Mouallem, a confirmé sur la chaîne Russia Today que «la participation de la Russie dans le combat contre Daech (acronyme arabe du groupe Etat islamique) et le Front al-Nosra (branche syrienne d’Al-Qaida) est encore plus importante que la fourniture d’armes à la Syrie».

Inquiet des récents revers de son allié historique face aux islamistes, Moscou craint bel et bien une défaite de Damas – et les méfaits du retour de milliers de djihadistes russes. D’où l’intensification de sa présence militaire, notamment autour de la base aérienne de Lattaquié, possible point de retrait du président Assad. «On ne parle plus seulement d’assistance militaire. La Russie se prépare à mener une campagne aérienne contre Daech, et met en place les infrastructures nécessaires», assure Igor Delanoë, chercheur géopolitique à l’Observatoire franco-russe?de Moscou.

Ces manœuvres interviennent alors que Vladimir Poutine reçoit lundi le premier ministre israélien Benjamin Netanyahou et mercredi le président palestinien Mahmoud Abbas. Puis, pour la première fois en dix ans, il assistera à l’Assemblée générale des Nations Unies à New York. La presse russe annonce déjà que, le 28 septembre, il axera son discours sur son «plan» en Syrie, jusque-là rejeté par les Occidentaux: créer, en partenariat avec l’armée de Bachar al Assad, une nouvelle alliance internationale sous mandat de l’ONU contre les djihadistes.

Face à la possibilité d’opérations aériennes concurrentes menées par les Etats-Unis et la Russie dans l’espace aérien syrien, le secrétaire américain à la Défense Ashton Carter s’est entretenu au téléphone vendredi avec son homologue russe Sergueï Choïgou. Une première depuis l’annexion de la Crimée par la Russie en 2014. «Pour le moment, informations et propagandes bien coordonnées entre Moscou et Damas font passer un message clair: la Russie montre qu’elle se donne les moyens de pouvoir agir unilatéralement en Syrie et veut ainsi pousser les Occidentaux à se mettre d’accord avec elle», soupçonne Pavel Felgenhauer, expert militaire à Moscou.

Le soutien militaire russe au régime de Bachar el-Assad risque de compromettre toute chance de règlement du conflit, a cependant déclaré dimanche le secrétaire d’Etat américain John Kerry.

Mais, au-delà de la Syrie, le message du Kremlin concernerait aussi indirectement l’Ukraine. En pleine crise économique, la Russie ne peut pas risquer en Syrie un nouvel Afghanistan. Elle peut par contre s’en servir comme levier diplomatique. En forçant les Occidentaux à se mettre d’accord avec elle en Syrie, elle leur montrerait qu’il faut faire de même en Ukraine.



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